« Plus vous visualisez, plus vous intégrez les mouvements et plus la voie va paraître facile. Vous pouvez essayer vingt fois « en vrai » et deux cent fois dans votre esprit et avoir les même résultats que si vous aviez travaillé et intégré la voie – comme si vous aviez essayé réellement cinquante fois. Sauf que vous allez économiser de la peau, du temps, et vos partenaires d’escalade. »
Adam Ondra, interview pour Climbing Magazine, nov. 2017
La visualisation est une technique qui vise à utiliser les ressources de votre esprit et de votre conscience pour améliorer la performance
L’intérêt de se préparer psychologiquement à réussir est simple. En vous installant dans un état mental approprié à la performance (concentration, confiance en soi, absence de peurs subjectives etc.) et en exerçant mentalement les facteurs qui font celle-ci, vous allez augmenter vos chances de réussite.
Concrètement, lorsque vous vous engagez dans une pratique de visualisation, la stimulation nerveuse qui en résulte va activer les neurones concernés par le mouvement, de la même manière que si vous étiez réellement en train de l’effectuer.
Pour établir un lien direct entre visualisation et hausse de la performance, celle-ci doit être pratiquée régulièrement, avec méthode et attention (Annett, J., « Motor imagery: perception of action ? » Neuropsychologia, vol. 33, 1995).
Une méthode intéressante est de combiner imagerie mentale et pratique physique. Cette méthode, qui a eu de nombreuses validations scientifiques, a été expérimentée dans de nombreux sports (karaté, basket, tennis, golf, gymnastique etc.). Certaines études ont même montrés que les effets de l’entrainement peuvent être plus importants si l’on combine séances de visualisation précises et détaillées et séances d’entrainement. Associer la visualisation à un entraînement permet d’obtenir davantage de gains de force qu’un entrainement seul (Lebon F. « Efficience du travail mental sur le développement et le recouvrement des capacités motrices – force musculaire et imagerie motrice… »Université Claude Bernard – Lyon I, 2009).
En pratique, la visualisation va comporter trois phases :
– un stade initial de relaxation où vous allez chercher à vous détendre, afin de créer un état psychologique propice à l’imagerie mentale ;
– le stade de visualisation à proprement parlé ;
– une phase de réalisation dans des conditions réalistes (dans notre cas, lorsque vous allez grimper « pour de vrai »)
On distingue deux types de visualisation :
– la visualisation dite « dissociée », vous vous imaginez de l’extérieur, à travers les yeux d’une tierce personne (comme si vous regardiez une vidéo d’escalade). Elle est particulièrement utile pour vous remémorez des performances passées et fortifier votre confiance en soi, ou analyser les éléments qui ont pu conduire à l’échec. Vous avez un point de vue externe, vous pouvez chercher à être le plus objectif possible et analyser vos erreurs.
– la visualisation dite « associée », où vous allez vous imaginez à travers votre propre perspective, à la première personne. L’intérêt de ce type de visualisation est de provoquer des réactions neurologiques similaires à celles de l’escalade, comme si vous étiez réellement en train de grimper. Ce type de visualisation est donc particulièrement utile pour réviser mentalement les méthodes dans une voie (position de votre corps, sensations sur les prises).
Vous pouvez pratiquer la visualisation partout. Prenez soin d’être dans un endroit calme, asseyez-vous confortablement, et imaginez la voie (ou le bloc) dans votre esprit. Révisez tous les mouvements, les placements, la sensation des préhensions dans vos mains, bref tous les détails qui composent votre projet. Si nécessaire vous pouvez même écrire le tout pour mieux vous en rappeler. L’idée est la même que lorsque vous appreniez vos poésies à l’école primaire…
A contrario, lorsque vous utilisez la visualisation, ne faites pas apparaître d’images négatives (peurs, chutes probables, doutes etc.). Utilisez votre esprit et votre conscience pour ressentir et pratiquer tout ce dont vous avez besoin pour enchaîner. La visualisation, comme la méditation, va activer les régions de votre cerveau responsables de vos émotions, ainsi que leurs manifestations physiques (les mains poisseuses quand vous avez peur par exemple).
Installez-vous dans un état mental propre à la performance
Avant de mettre des essais dans votre projet ultime, essayez de vous rapprocher mentalement le plus possible de l’état dans lequel vous étiez lors de précédentes réussites. L’idée est de se fabriquer une confiance en soi « artificielle », confiance en soi que vous allez activer sur demande. Revoyez donc les ascensions ou les réalisations de vie qui ont de l’importance à vos yeux et remémorez-vous les sensations positives que vous avez ressenti dans ces moments.
Plus vous allez apporter d’importance à la réussite d’un bloc ou d’une voie, plus vous allez ressentir les effets du stress. Essayez de vous détacher des enjeux et soyez patient avec vous-même. Apprendre à dompter son mental est un jeu fascinant qui, comme le reste, demande de la pratique.
La visualisation est un outil très efficace, car en connectant corps et esprit, vous allez augmenter vos habiletés et renforcer votre concentration.